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II

Auteurs :
Editeur :
Parution
2014
Type :
CDDisponible
Nouveau chef-d'oeuvre de la part de Led Zeppelin et véritable manifeste hard rock, dont cet album représente presque à lui tout seul les tables de la Loi, l'ABC du genre, qui va engendrer pléthore de vocations et notamment aux Etats-Unis, pays qui est traumatisé à la sortie de ce tour de force, fruit d?un superbe travail d'équipe. Ce disque vaut au groupe son premier numéro 1 outre-Atlantique et en Grande-Bretagne. Le premier album avait été enregistré par un groupe dont les membres ne se connaissaient alors que très peu et qui n'avait pas encore tout à fait trouvé sa raison d'être. Là, ces hommes ont désormais plusieurs concerts à leur actif (ils tournent sans relâche) et ils ont pu s'évaluer, réellement se découvrir et trouver ce qu'ils peuvent jouer ensemble et comment le jouer. C'est donc littéralement durant leur temps libre, entre deux prestations live, qu'ils réalisent ce "Led Zeppelin II", dont le son a ainsi toute l'urgence et la férocité de leurs concerts. Ceux-ci, invariablement brillants, sont souvent pour eux l'occasion de tester leur nouveau répertoire. Ainsi, le 9 mars 1969, ils jouent aux Maida Vale Studios de la BBC deux chansons, "What Is and What Should Never Be" et "Sunshine Woman", cette dernière devant rester inédite. Pleine d'astuces, "What Is and What Should Never Be" passe, elle, le test avec succès, et Page décide de la refaire pour le futur album en y ajoutant quelques effets, dont le fameux ping-pong sur la stéréo. Le 26 avril, en concert au Winterland de San Francisco, ils interprètent en dernier rappel une déclinaison du "You Need Lovin?" de Muddy Waters, écrit par Willie Dixon et déjà abordé sur disque par les Small Faces (dont Plant est très fan) quatre ans auparavant. Page ayant trouvé là-dessus un riff en or massif, bégayeur et rentre-dedans, Plant en change les paroles, dont il fait une proclamation de sa virilité de jeune homme, que ses hormones démangent encore sérieusement. Désormais, cela s'appelle "Whole Lotta Love", qui devient un des classiques absolus du hard rock et, amputé de son célèbre "pont" où Page joue avec tous les boutons de la console, fait même l'objet d'un single, qui se classe numéro 4 aux Etats-Unis. Début juin, ils sont de retour à Londres, où ils enregistrent aux Olympic Studios les versions définitives de "What Is and What Should Never Be" et de "Whole Lotta Love", chansons qu'ils présentent au public anglais dans une nouvelle séance pour la BBC, réalisée le 24 juin. Entre-temps, le 19 juin, ils ont fait un voyage-éclair à Paris pour l'émission de télévision Tous en scène, où ils ont clôturé leur mini-set avec une version de "Whole Lotta Love". Après leur prestation à la BBC (où ils ont joué une autre nouvelle chanson, la magnifique "Travelling Riverside Blues", qui est à son tour laissée de côté), ils se rendent aux Morgan Studios, où Ten Years After a l'habitude de travailler. Là-bas, ils enregistrent le très moyen "Living Loving Maid (She's Just a Woman)", une chanson méchante, sur les groupies américaines entre deux âges, qui sera pourtant conservée pour l'album. Décidément moins inspirés, ils essaient dans la foulée "Sugar Mama", un boogie médiocre piqué à John Lee Hooker et que Page laisse vite tomber (en 1982, il songera à l'exhumer pour "Coda", mais les autres ont le bon goût de l'en empêcher). Heureusement, ils ont aussi sous le coude le magnifique "Thank You", une ballade presque médiévale, de grande classe, avec une guitare acoustique et un orgue très solennel. Romantique, Plant, qui, en quelques mois, a considérablement progressé en tant que parolier, la dédie à sa femme Maureen, certaines des formules poétiques qu'il emploie dans son texte venant du "Seigneur des Anneaux" de JRR Tolkien et Page y fait très distinctement des choeurs - sans vergogne, le guitariste et producteur "pompe" à nouveau pour l'arrangement, piquant à Traffic le final de son "Mr. Fantasy". Mais c'est aux Etats-Unis, terre qui les inspire particulièrement, qu'ils écrivent et enregistrent le plus gros du disque, voyageant avec dans leurs bagages les masters des titres réalisés à Londres, n'hésitant pas à y faire des corrections ou des ajouts de dernière minute. Ils composent sur la route, les riffs étant trouvés lors des balances ou à l'hôtel, où Plant rédige aussi ses paroles. Ainsi, toujours avec "Le Seigneur des Anneaux" en tête, "Percy" (son surnom) a l'idée de "Ramble On", superbe chanson où il évoque certains des personnages de ce qui est alors son livre de chevet, comme pour beaucoup de hippies. C'est à New York que cet autre classique est mis sur bande, de même que le très macho "Heartbreaker", un festival Jimmy Page, avec un riff surpuissant, un pont dérivant du "Fall on You" de Moby Grape et un solo bien méchant et presque noisy. Aux studios Mirror Sound de Los Angeles, ils finalisent une reprise du "Killing Floor" de Howlin' Wolf (titre déjà abordé par Jimi Hendrix), à laquelle Plant ajoute quelques paroles prises au bluesman Robert Johnson. Ils connaissent bien cette chanson, puisqu'ils la jouent sur scène depuis leurs touts débuts, mais ils ont alors l'audace de la signer eux-mêmes et de la rebaptiser "The Lemon Song" : certains pressages du disque la créditeront à Howlin' Wolf tout seul, mais la majorité porte la signature de ces quatre petits voyous qui ne reculent décidément devant rien. Peu de groupes peuvent alors s'enorgueillir d'avoir dans leurs rangs un batteur aussi complet et polyvalent que John Bonham, dont la frappe, à la fois lourde et agile, héritée des plus grands jazzmen, est l'arme secrète de Led Zeppelin. Il a donc droit à un morceau pour lui tout seul, basé sur son solo de concert, qu'il joue tous les soirs en le présentant comme "Pat's Delight" ("le délice de Pat", Pat étant le nom de sa femme). Il le rebaptise alors "Moby Dick" (allusion aussi bien au roman de Melville qu'au groupe Moby Grape), Page y ajoutant une intro et un riff "empruntés" au "Watch Your Step" de Bobby Parker - il en avait déjà fait une chanson, jouée par Led Zeppelin à la BBC mais restée inexploitée, "The Girl I Love She Got Long Black Wavy Hair". Outre le fait qu'il comporte un passage joué à mains nues, ce solo a pour originalité de n'être jamais barbant et de ne pas sonner prétentieux. L'idée n'est certes pas neuve (Ginger Baker, de Cream, avait déjà eu "Toad"), mais la virtuosité et la subtilité de Led Zeppelin font vraiment toute la différence ici, même si "Moby Dick" tournera à un certain moment au pensum sur scène. Enfin, Willie Dixon, qu'on peut presque qualifier de cinquième membre de Led Zeppelin à ce moment-là, est à nouveau copié, sur "Bring It On Home", dont la première moitié est une imitation presque note pour note de la chanson du même nom, interprétée sur disque par Sonny Boy Williamson, Plant y prenant un accent de vieux paysan noir alcoolique. Discret mais toujours infaillible, John Paul Jones se déchaîne sur le final, nouvelle illustration de ce que peut faire Led Zeppelin à partir d'un blues classique, qui se transforme en un véritable ouragan sonore. Puisqu'il y a tout de même une justice en ce bas monde, à partir des années 90, sur toutes les rééditions de l'album, Dixon sera crédité non seulement sur "Bring It On Home", mais aussi sur "Whole Lotta Love". Mais qu'importe : après tout, ne dit-on pas des petits artistes qu'ils "copient" et des grands qu'ils "volent" ? Et là, Led Zeppelin vole, en effet : très loin et très haut. Remasterisé, Led Zeppelin II est réédité en juin 2014 dans un double volume comprenant des prises alternatives et des chutes de studio. Frédéric Régent - Copyright 2017 Music Story
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